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La veille en japonais pour les nuls

14 Jan 2014, Posté par T. Perran dans Conseil

Le japonais écrit : un dragon à trois têtes !

(Affiche du film Godzilla contre Ghidorah, sorti en 1964)

La langue japonaise est l’une des plus difficiles à maîtriser sur le plan de l’expression écrite. Il existe en effet trois modes d’écriture pour le japonais:

  • Les idéogrammes ou caractères chinois (kanji en japonais), importés de la langue chinoise il y a plus de 1000 ans
  • Le syllabaire Hiragana, inventé par les courtisanes japonaises pour simplifier leur correspondance
  • Le syllabaire Katakana, inventé (peu de temps après les hiragana) par les moines japonais pour retenir la prononciation des caractères chinois

Dans le japonais écrit de nos jours, ces trois modes d’écriture se côtoient. La langue japonaise étant pauvre en nombre de sons différents, il y a beaucoup d’homophones et les idéogrammes servent à différencier un mot d’un autre. Ainsi, les mots anciens s’écrivent en kanji. Pour cela, il y a 2136 kanji officiels ou d’utilisation commune, qui ne suffisent pas pour décrire des lieux ou des champs de spécialité comme la médecine, l’astronomie, etc… Les japonais utilisent alors les kanji non-officiels, au nombre de 9000 environ actuellement, d’où un total de plus de 11 000 kanji, que l’on peut trouver sur les sites internet japonais !

Les syllabaires Hiragana et Katakana

Le syllabaire hiragana sert principalement à la syntaxe grammaticale et permet de savoir comment se lisent les kanji, car ces derniers peuvent se lire de plusieurs façons suivant leur utilisation seule ou avec d’autres kanji. Enfin, le syllabaire katakana est traditionnellement dédié à la traduction phonétique des mots modernes importés d’autres langues comme l’anglais, que l’on ne peut transcrire avec les idéogrammes anciens.

Quelques exemples parmi les 2136 kanji officiels (joyo kanji) ou kanji d’utilisation commune.

Ainsi, le japonisant peut passer sa vie en à étudier le japonais écrit sans jamais vraiment le maîtriser, un  peu comme de l’art. L’écriture du japonais est d’ailleurs un art à part entière, la calligraphie, pour lequel nombre de japonais se passionnent et s’exercent régulièrement, comme l’a illustré le film The Pillow Book de Peter Greenway.

Affiche du film "The Pillow Book" par Peter Greenway, sorti en 1996

Fort heureusement, il n’est pas nécessaire de savoir écrire le japonais pour pouvoir lire le japonais, et plus important, grâce aux outils sur internet, il devient possible de « lire » le japonais sur le web sans jamais l’avoir étudié. Pour le veilleur non-japonisant, cela signifie qu’il peut désormais s’adonner à la recherche d’information en japonais, moyennant quelques gymnastiques intellectuelles.

 

L’intérêt de la recherche d’information en japonais

Le Japon est le pays qui consacre le plus d’effort (% de PIB) à la R&D sur son territoire

Le Japon est la troisième puissance économique au monde, mais a vécu près de trois siècles reclus sur lui-même en fermant ses frontières aux étrangers et en se développant par ses propres moyens uniquement. Rien de tout cela n’est valide aujourd’hui, mais de cette époque reste tout de même l’idée sous-jacente que les japonais sont mieux entre eux et qu’ils n’ont pas de besoin de l’étranger pour innover et aller de l’avant, d’où une langue complexe utilisée exclusivement dans l’archipel japonais qu’il est très difficile de maîtriser.  Ainsi, les japonais consacrent des moyens considérables pour innover et privilégie la communication entre eux par le biais de leur langue qui sert en quelque sorte de barrière contre l’étranger. Dit autrement, les informations techniques sur les innovations au Japon sont abondantes en japonais et sont faméliques en anglais, et cela même quand les sites internet sont bilingues. Si l’on s’intéresse par exemple à des sociétés japonaises, à des laboratoires japonais ou même à des technologies avec de forts acteurs japonais, la recherche d’information en japonais devient obligatoire.

Acquérir le vocabulaire de son domaine

La notion de vocabulaire est très importante en japonais. C’est la première tâche fastidieuse à accomplir pour le non-japonisant, le japonisant et même le japonais. En effet, décrire des innovations récentes à l’aide d’idéogrammes qui ont plus de 1000 ans d’existence n’a rien d’évident et surtout rien d’intuitif. Par exemple, on dit que les scientifiques japonais, lorsqu’ils rédigent une thèse, passent l’essentiel de leur première année à acquérir le vocabulaire très spécifique de leur domaine d’expertise. Sans ce travail, ils sont incapables de comprendre complètement la littérature scientifique de leur domaine. Pour faire de la veille en japonais, la logique est la même et il faut acquérir les mots clés liés aux motifs des recherches d’informations.

Avec de la méthode, celui qui ne connait rien en japonais peut toujours tirer son épingle du jeu dans l’océan d’information japonais. Cela dit, même si les outils et traducteurs automatiques ont fait beaucoup de progrès ces dernières années, il faut reconnaître le passage du japonais vers le français et inversement se passe plutôt mal, et il faudra toujours privilégier les traductions du japonais vers l’anglais, pour ensuite revenir vers le français par ses propres moyens.

Firefox, toujours l’ami des veilleurs

Comme c’est souvent le cas, le logiciel de navigation sur internet Firefox facilite beaucoup les choses, et tout particulièrement la recherche d’information dans une langue que l’on ne maîtrise pas. Avec Firefox, l’utilisateur a accès à toute une série de plugins et de moteurs de recherche intégrés à la barre d’outil qui feront gagner beaucoup de temps. Voici une méthode en quatre étapes pour tirer son épingle du jeu face à des sites japonais.

  • Etape 1: Télécharger les plugins de traduction de l’anglais vers le japonais

Mycroft Project centralise bon nombre de moteurs de recherche et plugins pour Firefox. Pour acquérir les mots clés en japonais en partant d’un mot en anglais, je vous recommande les plugins Denshi Jisho Word – English et WWWJDIC CA – Dictionary Lookup. Il suffit de cliquer sur les noms des plugins, une fois arrivé sur la page de Mycroft Project, pour les ajouter. Avec ses deux plugins, vous aurez accès à d’excellentes traductions, même pour des mots techniques.

  • Etape 2: Télécharger des moteurs de recherche japonais

Cette fois-ci, je vous recommande les moteurs Google Japan et Yahoo Japan (cliquer sur le premier nom sous Major Engines), qui sont de loin les moteurs les plus utilisés au Japon.

  • Etape 3: Faire des recherches en japonais

Avec les nouveaux plugins téléchargés, il suffit de cliquer sur la flèche (en haut à gauche) dans l’espace dédié aux recherche dans la barre d’outils de Firefox (voir impression d’écran ci-dessous) pour faire apparaitre la liste des plugins et des moteurs de recherche. Pour trouver des mots clés en japonais, il suffit de choisir dans cette liste Denshi Jisho – Words ou WWWJDIC CA – Dictionary pour trouver des mots japonais pertinents. Ci-dessous, j’ai fait un essai sur le mot technique Soudure, donc « Welding » en anglais, pour obtenir une série de mots en japonais.

Liste des plugins et moteurs de recherche (en haut à droite) téléchargés dans la barre d’outils

Ensuite, il suffit de choisir les mots qui sont les plus en adéquation avec sa recherche pour les copier et les coller dans l’espace dédié aux recherches dans la barre d’outils de firefox. Une fois le mot japonais collé, il suffit de choisir un moteur de recherche japonais dans la liste, soit Google Japan ou Yahoo! Japan, pour lancer la recherche. Il est plus pratique de faire ces recherches dans un autre onglet.

  • Etape 4: Traduction des pages japonais en anglais

Une fois les requêtes avec les moteurs de recherche japonais lancés, on obtient une liste de site en japonais. Cette fois-ci, il faut cliquer un lien pour aboutir une page où il y a du texte en japonais. Une fois arrivé sur cette page, on copie l’adresse de la page internet pour ensuite la coller dans un site de traduction en ligne gratuit. Il en existe beaucoup et la qualité se laisse à désirer. Mais le plus important reste que ces sites sont quand même en mesure de donner un niveau de traduction, qui permet de savoir de quoi on parle sur cette page. C’est généralement suffisant pour identifier des acteurs sur un marché donné ou une technologie donnée.

Exemple de site japonais, qui servira de référence pour les essais de traduction

Pour avoir plus de succès, il est conseillé d’utiliser plusieurs traducteurs automatique d’URL. Les traducteurs d’URL du japonais vers l’anglais, disons les moins mauvais, sont Google Translate, Bing Translator et Weblio. Il faut surtout veiller à choisir l’anglais comme langue de destination, et surtout pas le français, sous peine de catastrophe…

Traduction du site japonais de référence par Google Translate

Il est certain que la traduction automatique va connaître des progrès fulgurant dans les années à venir, notamment par l’apport des technologies liées au Big Data qui vont finir à apporter de la qualité aux approches statistiques des traductions. Cela dit, comme on peut le voir sur les essais de traduction avec Google Translate (ci-dessus) et Bing Translator (ci-dessous), les traductions sont perfectibles et diffèrent d’un outil à un autre, mais elles sont d’un niveau suffisant pour savoir de quoi il est question sur le site internet japonais  et ainsi déterminer si la recherche a été pertinente.

Traduction du site japonais de référence par Bing Translator

Avec cette méthode, il est possible d’identifier des acteurs japonais et de dresser des cartographies à partir de sources japonais sans connaitre le moindre mot en japonais.

Pour aller plus loin, il est tout de même nécessaire de maîtriser la langue japonaise et pour le coup une nouvelle série d’outils et de plugins est disponibles pour les japonisants. A ce stade, il s’agit de procéder à l’analyse des informations, de recouper les informations et d’aller chercher les informations grises, que les japonais eux-mêmes cherchent à cacher à leurs compatriotes.

Pour cela, la société Viedoc reste naturellement à votre disposition pour vous accompagner dans cette démarche ardue.

Aussi, n’hésitez pas à nous contacter.